Si les médias sont souvent associés à des grandes figures du journalisme et de l’animation, il semblerait que les monstres sacrés du champ audiovisuel français s’attardent et, plus globalement, que ce secteur peine à se renouveler en profondeur.
Alors que les journalistes sont de plus en plus jeunes et que l’engouement pour la profession est croissant, il semblerait que ce soient toujours les mêmes personnalités charismatiques qui soient à la tête de la plupart des programmes populaires. Pensons notamment aux Franz-Olivier Giesbert, Ivan Levaï, Gérard Holz, Daniel Mermet, Jean-Pierre Foucault, Michel Drucker ou encore Patrick Sebastien, qui se servent de leur capital sympathie pour faire vivre leurs styles et concepts d’émissions ou autres chroniques jusqu’à l’épuisement.
Inépuisables, quant à eux, ces monstres sacrés du journalisme ou de l’animation ont écumé tous les supports, navigant de la radio à la télévision en passant par la presse écrite, ils font partie intégrante du panorama audiovisuel français et sont bien décidés à y rester. Omniprésents et multimédia, ils cumulent en effet les temps de parole avec des rendez-vous souvent quotidiens à la télévision et/ou à la radio, des apparitions au sein de nombreux autres programmes en tant qu’invités et des billets réguliers dans les grands journaux. En parallèle, ils rédigent également quelques ouvrages d’opinion ou autobiographiques.
La mutation de la sphère médiatique
Radio et télévision sont les deux médias les plus concernés par cette tendance. Pour preuve, si l’on fait la moyenne des présentateurs les plus populaires à la télévision, le PAF (Paysage Audiovisuel Français) a 50 ans !(1) Dès lors on pourrait penser que ces deux médias, dits « classiques », sont vieillissants et en récession mais il n’en est rien. En effet, malgré la multiplication des écrans, la télévision reste le support de divertissement préféré des ménages français – en moyenne un Français regardait la télévision 3h50 par jour en 2012 contre 3h20 en 2002. De plus, cette progression régulière concerne toutes les tranches d’âge, ce qui prouve sa capacité d’adaptation aux nouveaux modes de consommation et aux attentes des téléspectateurs de tous âges. De même, la radio reste un média largement plébiscité ; elle représente en effet le deuxième média préféré par les Français pour s’informer, après la télévision. Son audience est large et régulière avec un temps d’écoute moyen de 1h34 par jour.
Malgré tout, si certains craignent la disparition des médias dits « classiques » au profit de l’Internet et des contenus dématérialisés, notons que les médias se transforment et s’adaptent aux nouveaux outils et aux nouvelles pratiques ; vidéos à la demande (VOD), podcasts, utilisation du second écran sont autant d’exemples qui le prouvent.
Un secteur qui peine à se renouveler
Le champ médiatique français est partagé entre les émissions devenues institutions – Questions pour un Champion animé par Julien Lepers, Les Grosses Têtes de Philippes Bouvard sur RTL, la météo d’Évelyne Dhéliat sur TF1 entre autres – et les programmes plus expérimentaux qui ne durent pas plus d’une saison. Dans ce contexte, les nouvelles figures du journalisme et de l’animation peinent à s’imposer au long terme. De plus, avec un effectif (en possession d’une carte de presse) de 20 000 hommes et 16 000 femmes, les journalistes représentent un ensemble hétérogène et compétitif, et peu de présentateurs seniors sont enclin à laisser leur place à la nouvelle génération. Encouragés par tout d’abord par leur popularité mais aussi aidé par le phénomène de starification, la pratique de l’autocélébration et plus globalement, l’entretien du mythe du journaliste, ces stars confirmées se maintiennent en place et repoussent leurs fins de carrière.
Notons néanmoins que ce vieillissement des figures charismatiques n’est pas le seul fait de leur volonté à rester en activité mais est également dû à leur popularité auprès des téléspectateurs qui préfèrent en moyenne des personnalités d’âge mûr (2). À ce sujet Michel Drucker déclarait en 2012 : « Pas de retraite dans notre métier. Les téléspectateurs avec leur télécommande, décident si nous devons continuer ou pas. »(3)
Au vu de cette réflexion, il paraît nécessaire qu’un renouvellement des figures de proue des médias s’opère afin, d’une part, de laisser la place au jeunes et d’autre part, d’offrir aux auditeurs et spectateurs de nouvelles pistes de compréhension de l’actualité ou de nouvelles façons d’aborder le divertissement.
(1)Moyenne basée sur l’étude de notoriété réalisée par l’agence Omnicom Media Group (OMG), menée du 18 au 24 février 2014 auprès d’un panel de 1099 personnes âgées de 15 à 60 ans (Source : Animat 2014. Enquête OMG-Stratégies).
(2)Les animateurs télé préférés des français selon l’étude précédemment citée (Animat 2014. Enquête OMG-Stratégies – Op. cit.) sont Michel Cymes et Frédéric Lopez, respectivement âgés de 57 et 47 ans.
(3)Entretien de Michel Drucker à L’Express, 22/10/2012.
Source des photos : www.micheldrucker.fr / www.linternaute.com /