Des élections législatives incertaines au Pakistan Des élections législatives incertaines au Pakistan Des élections législatives incertaines au Pakistan
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Des élections législatives incertaines au Pakistan

Publié le 25 septembre 2023,
par VisionsMag.
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Dans un pays où aucun Premier ministre n’est jamais allé jusqu’au bout de son mandat, les élections législatives pakistanaises à venir s’annoncent à la fois incertaines, potentiellement explosives et d’une importance capitale pour l’avenir du Pakistan.

Entre crises politiques, économiques et même des catastrophes environnementales sans précédent, c’est un euphémisme de dire que le Pakistan connaît des temps difficiles. Les inondations ayant ravagé le pays entre juin et octobre 2022 notamment ont laissé le pays exsangue : au moins 250.000 habitations ainsi qu’1,8 million d’hectares de terres agricoles ont été détruites, et plus de 1700 vies ont été perdues dans les flots. Et alors que le pays est endeuillé, appauvri, aucun leadership clair ne semble se détacher après la sortie successive des deux derniers premiers ministres en moins d’un an.

La sortie bruyante d’Imran Khan…

La course des législatives commence avec Imran Khan, l’ancien international de cricket devenu chef d’État en 2018. Renversé par une motion de censure en avril 2022, il n’a depuis cessé de clamer être la victime d’un complot international. Bien qu’il soit connu pour régulièrement avancer des théories farfelues sans la moindre preuve, l’acharnement judiciaire de son successeur Shebaz Sharif à l’encontre de Khan laisse effectivement songeur. Plus de cent procédures sont actuellement en cours notamment pour des accusations de corruption et de terrorisme, et Imran Khan a même été victime d’une tentative d’assassinat en novembre dernier ! Blessé à la jambe, il accuse publiquement Shehbaz Sharif d’avoir commandité la tentative et refuse désormais de se rendre au tribunal malgré les mandats d’arrêts lancés contre lui.

Il faut dire que Sharif, leader de la Ligue musulmane du Pakistan, est lui aussi régulièrement accusé de corruption et de collaboration avec l’armée dans le cadre d’interventions illégales dans le Pendjab. De plus, le fait qu’il soit le frère de Nawaz Sharif, lui-même premier ministre à trois reprises et actuellement exilé à Londres depuis sa condamnation à 7 ans de prison pour corruption ne lui apporte que peu de popularité. Et continue de donner du crédit aux allégations de Khan. Surtout qu’il semblerait que Shehbaz travaille activement au retour de son frère, ajoutant un évident parfum de népotisme à la corruption ambiante…

… Et celle tout aussi mouvementée de Shehbaz Sharif

Sharif semblait pourtant avoir pris quelques distances avec son frère Nawaz ces dernières années, critiquant notamment ses éventuelles confrontations avec les militaires. En effet, et c’est un secret de polichinelle, il est virtuellement impossible d’arriver au pouvoir sans le soutien de l’armée pakistanaise. Une erreur que ne veut visiblement pas reproduire Shehbaz, qui s’est rapproché de plusieurs généraux clés depuis 2021. Il a également signé de nouveaux accords avec le Fonds Monétaire International, avec qui son prédécesseur avait rompu les liens. 

Conscient que le soutien populaire pour Khan persiste, contrairement à la sienne, Sharif tente de consolider sa position à l’aide d’un rapprochement avec le Parti du Peuple Pakistanais de centre-gauche dirigé par Bilawal Bhutto Zardari. Une association surprenante à bien des égards, la famille Bhutto étant une rivale politique des Sharif depuis déjà plusieurs générations. Et même si cette alliance leur a permis d’écarter Khan, Sharif ne peut éviter de devoir dissoudre l’Assemblée 9 août 2023, provoquant de fait sa propre éjection du poste de Premier Ministre. Le Pakistan se retrouve ainsi sans gouvernement définitif tandis que les hommes forts de chaque parti lancent une campagne accélérée en vue des élections législatives qui devraient donc se tenir au plus tard le 10 novembre.

Quel futur pour le Pakistan ?

Il semble assez clair qu’entre les affaires de corruption, de népotisme militariste et d’assassinat, les élections législatives pourraient bien être littéralement explosives ! Bien que Khan semble toujours être la coqueluche du peuple, sa récente destitution semble l’exclure de la course mais n’écarte pas la possibilité que sa simple présence médiatique puisse mettre le feu aux poudres. Souvent considéré comme un populiste, Khan et ses plus fervents militants semblent bien décider à continuer la lutte contre les dynasties politiques de Sharif et Bhutto. Quant à savoir jusqu’à quelles extrémités… 

De leur côté l’alliance entre la Ligue Musulmane et le Parti du Peuple est si surprenante qu’elle ne semble pas pouvoir tenir bien longtemps. Toutefois, aucun des deux partis, malgré leurs tentatives de rapprochement respectives, ne semblent pour le moment avoir les faveurs définitives de l’armée. Et sans ce soutien, tous les scénarios sont envisageables, y compris les plus violents.

Autant d’ingrédients qui encouragent de nombreux observateurs à penser que la politique pakistanais est ainsi arrivée à un point charnière de son histoire moderne. Peut-être même à l’aube d’une véritable révolution ?

Sources des photos : la-croix.com / france24.com / observatoirepharos.com

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Paskistan : des élections à venir d’une importance capitale
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