Le 9 novembre dernier, Google rendait hommage à Hedy Lamarr, qui aurait fêté ses 101 ans. Un Doodle animé retraçait le destin hollywoodien de cette Austro-Américaine de talent. Actrice à succès de l’âge d’or du cinéma, productrice audacieuse, mais pas seulement ! La quasi-totalité de l’humanité profite quotidiennement de l’une de ses inventions. Parcours d’une femme d’exception.
Des débuts sulfureux
C’est à seize ans que Hedy-Hedwig Eva Maria Kiesler de son vrai nom, pousse la porte des studios Sascha de Wien. Elle est engagée comme scripte avant de faire ses premiers pas comme actrice. Elle rejoint Berlin où elle travaille avec le metteur en scène Max Reinhardt. Subjugué par sa beauté, il déclare à la presse que Hedy est « la plus belle femme du monde ». Et il n’est pas le seul à tomber sous le charme de la belle Hedy, dont les débuts sont salués par des critiques élogieuses.
Mais c’est en 1933, avec le film germano-tchèque Extase de Gustav Machaty, que sa notoriété va réellement exploser. Hedy y joue en effet une scène très subversive pour l’époque : un orgasme en plan rapproché. Elle apparaît également totalement nue dans une autre scène. Présenté à la biennale de Venise, le film sera condamné par le pape Pie XII. Les groupes religieux puritains de l’Amérique des années 30 ne voient pas non plus le film d’un bon œil et il ne sortira en salle qu’en 1940 et ce que dans certains Etats plus libéraux. Hedy gagnera quant à elle l’image d’une femme sulfureuse et audacieuse, qui la suivra jusqu’à la fin de sa vie.
Faire disparaître la moindre copie du film sulfureux
Ce succès soudain n’est pas non plus du goût de son premier mari, Fritz Mandl, marchand d’armes autrichien, par ailleurs proche de la droite nationaliste autrichienne. Il se met en tête de faire disparaître la moindre copie du film et de mettre un terme à la carrière prometteuse de l’indépendante Hedy. Celle-ci finit par s’échapper en droguant la domestique chargée de la surveiller et en lui subtilisant son uniforme.
Hedy passe par la Suisse et la France, où elle côtoie la jet set. On lui suggère de changer de nom et c’est en hommage à l’actrice de films muets Barbara Lamarr qu’elle commence sa carrière à Hollywood sous le nom de Hedy Lamarr.
Clarke Gable, Spencer Tracy ou Robert Taylor
Un contrat de sept ans avec les prestigieux studios Metro-Goldwyn-Mayer en poche, Hedy jouera dans une quinzaine de longs métrages dans lesquels elle interprètera souvent des rôles de femmes fatales et provocantes. Son premier film outre-Atlantique, Casbah de John Cromwell, est couronné de succès et suffit à la promouvoir au rang de « révélation ». Sa beauté est « à couper le souffle » et elle partage l’affiche avec des symboles de l’époque comme Clarke Gable, Spencer Tracy ou Robert Taylor.
Elle est toutefois cantonnée à des rôles purement « plastiques » et rêve de montrer qu’elle peut assumer des rôles plus sérieux. C’est pour cela que, en 1946, elle se lance dans la production indépendante. Elle s’offre ainsi son meilleur rôle dans Le Démon de la chair, où elle excelle en jouant une criminelle schizophrène. C’est, avec Extase et Samson et Dalila (1949), le film de référence qui aura marqué sa carrière. Malheureusement, l’échec du film La Femme déshonorée marque la fin de sa carrière de productrice.
Hedy Lamarr la scientifique
Mais la belle Hedy n’était pas qu’une actrice ou productrice et ses centres d’intérêts allaient bien au-delà de sa carrière cinématographique. Elle s’intéressait particulièrement aux sciences. Et ce n’était pas un passe-temps entre deux prises de vue ! Véritable scientifique, elle a quelques inventions à son actif : un feu tricolore amélioré et une pastille effervescente produisant une boisson sucrée, dont elle avouera elle-même que ce n’était pas une grande réussite!
C’est auprès de son premier mari qu’elle s’initie au système de contrôle des torpilles. En 1941, voulant participer à l’effort de guerre, elle met au point, avec son ami le compositeur George Antheil, un système de communications secrètes applicable aux engins radioguidés, comme les torpilles. Basée sur la variation simultanée des fréquences de l’émetteur et du récepteur, cette invention snobée car venant d’une femme à la réputation sulfureuse, ne sera finalement utilisée par l’armée que des décennies plus tard, lors de la crise des missiles de Cuba en 1962 et pendant la guerre du Vietnam.
« Un géant intellectuel comparé aux autres actrices d’Hollywood »
Dans les années 80, les progrès de l’électronique, notamment la téléphonie mobile et technique Wi-Fi démocratisent l’utilisation de la « technique Lamarr». Hedy et son George sont admis, à titre posthume, au National Inventors Hall of Fame en 2014. Hedy reçoit également le prix de l’Electronic Frontier Foundation qui œuvre pour la défense de la liberté d’expression sur Internet.
En 1957, Hedy Lamarr se retire de la vie publique après quelques échecs. Antheil disait d’elle qu’elle « était un géant intellectuel comparé aux autres actrices d’Hollywood ». Les apparences l’auront souvent desservie. Mariée et divorcée à six reprises, de trop nombreuses déceptions… elle se mure dans la mélancolie et la solitude. Chirurgie esthétique ratée, fortune dilapidée et vols à l’étalage clôturent tristement le parcours hors du commun de cette femme d’exception. Et c’est coupée du monde qu’elle meurt à l’âge de 85 ans.
Photos : www.timesofisrael.com / usbek-et-rica.fr / www.sliptalk.com