La Chine profite des sanctions américaines pour renforcer sa présence en Iran
L’annonce de la sortie des Etats-Unis de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien renforce la position de la Chine en Iran. L’Empire du Milieu, premier partenaire économique de la République islamique, ne craint nullement les sanctions de Trump et continue plus que jamais à développer les infrastructures dans le cadre de son projet de nouvelles routes de la soie. Mais pour Téhéran, cela est une stratégie risquée qui pourrait l’isoler sur la scène internationale.
En septembre dernier, la première ligne ferroviaire Téhéran – Yinchuan (nord-ouest de la Chine) a été inaugurée. La Chine possède maintenant une voie royale pour pénétrer l’Iran et se rapprocher ainsi du Moyen-Orient et de l’Europe. Une manière aussi pour les Iraniens de démontrer qu’ils n’ont pas forcément besoin des Etats-Unis pour poursuivre leur développement économique et structurel.
Le lancement de cette ligne de transports de marchandises qui traverse le Kazakhstan et le Turkménistan intervient dans un contexte géopolitique tendu pour l’Iran. En mai 2018, Donald Trump, le président des Etats-Unis, a annoncé le retrait de son pays de l’accord sur le nucléaire iranien qui est en vigueur depuis 2015. Il avait à cette occasion menacé de brandir « des sanctions économiques au niveau le plus élevé possible », contre la République islamique et exhorté ses entreprises à ne plus effectuer de projets en Iran.
L’Iran, carrefour stratégique pour la Chine
Face à ce tour de force diplomatique américain, Téhéran ne demeure pas les bras croisés et renforce ses liens avec son imposant voisin dans la région : la Chine qui est son plus grand partenaire économique (en septembre 2017, les Chinois ont validé plus de 10 milliards d’euros de lignes de crédits afin d’aider au développement d’importantes infrastructures en Iran).
L’Empire du Milieu défend ainsi sa politique de l’OBOR (One Belt, One Road : une ceinture, une route) afin d’appuyer sa stratégie diplomatico-économique consistant à développer ses nouvelles routes de la soie, maritimes et terrestres : la construction d’une voie ferrée pénétrant l’Asie centrale était donc un enjeu majeur pour Pékin.
Bientôt une voie ferrée entre le golfe Persique et Téhéran
Au-delà du rapprochement géopolitique avec l’Iran, elle possède des atouts de grande taille : un gain de vingt jours par rapport au transport maritime et un coût d’acheminement inférieur, sans compter l’impact sur l’environnement qui est évidemment plus faible avec le transport ferroviaire.
Mieux, cette voie ferrée est le point de départ d’un réseau qui s’étendra jusqu’à Shanghai à l’est de la Chine (espéré pour 2021) et jusqu’en Turquie. Le développement du chemin de fer en Iran ne s’arrêtera d’ailleurs pas à Téhéran puisqu’un contrat à 700 millions d’euros avait été signé en mars 2018 entre les deux Etats pour relier la capitale iranienne à Bouchehr, le port industriel du pays situé dans le golfe Persique. Aujourd’hui, l’acheminement des marchandises entre ces deux villes s’effectue en camion et manque donc cruellement d’efficacité. Cette future voie ferrée permettra à la Chine de relier son pays au golfe et donc pénétrer avec plus de rapidité le marché de la péninsule arabe.
La crainte d’un isolement pour Téhéran
Si la Chine est un formidable appui pour le développement de l’Iran, la République islamique craint pourtant son trop grand l’impact dans son économie (plus de 25 % des échanges commerciaux en 2017). Cette tendance peut isoler l’Iran qui craint plus que jamais une sortie de l’accord sur le nucléaire de ses alliés occidentaux. Si tel était le cas, l’Iran ferait face à d’importantes sanctions d’embargo économique et la Chine renforcerait sa place de partenaire principal. Une perspective qui provoquerait un effondrement des tarifs des exportations iraniennes, particulièrement celui du pétrole, qui pourrait drastiquement baisser si Pékin devenait l’importateur exclusif.
La décision de Donald Trump du mois de mars a donc provoqué une redistribution des cartes en Asie centrale. L’Iran possède de la ressource mais craint pour la dépendance de son économie et de son développement vis-à-vis de la Chine. L’accord sur le nucléaire de 2015 est plus que jamais le sésame le plus précieux pour Téhéran afin de ne pas être isolé sur la scène internationale.
sources des photos : asialyst.com / la-croix.com / globalconstructionreview.com