Le pouvoir vénézuélien salue l'élection de sa nouvelle assemblée
par Brian Ellsworth
CARACAS (Reuters) – Le Parti socialiste au pouvoir au Venezuela s’est engagé lundi à ce que l’assemblée constituante se mette au travail au plus vite, au lendemain d’un scrutin contesté et largement boycotté par l’opposition.
Une dizaine de personnes, au moins, ont été tuées dans des heurts qui ont opposé la police à des adversaires du président Nicolas Maduro.
Ce dernier a assuré que l’assemblée constituante, élue avec une participation de plus de 40%, permettrait de ramener la paix après quatre mois de manifestations violentes au cours desquelles plus de 120 personnes ont perdu la vie.
Selon la commission électorale, 8,1 millions d’électeurs se sont rendus aux urnes dimanche, un chiffre nettement supérieur aux 2,5 millions estimés par l’opposition.
L’opposition vénézuélienne assure que le président Maduro va se servir de cette assemblée pour resserrer encore son emprise sur le pouvoir en dépit de son impopularité et de la crise économique et politique que traverse le pays.
Ces difficultés économiques pourraient s’accentuer si les Etats-Unis, principal débouché du pétrole vénézuélien, mettaient à exécution leurs menaces de sanctions économiques.
« Un porte-parole de l’empereur Donald Trump a dit qu’ils ne reconnaîtraient pas les résultats de l’élection de l’assemblée constituante », a déclaré le président Maduro devant une foule de sympathisants.
« Pourquoi devrions-nous nous soucier des déclarations de Trump ? (…) Nous nous soucions de ce que le peuple vénézuélien veut », a-t-il ajouté.
DES CONDAMNATIONS EN SÉRIE
L’Union européenne a condamné le recours « excessif et disproportionné à la force » au Venezuela.
« Le Venezuela dispose d’institutions légitimes démocratiquement élues dont le rôle est de travailler pour trouver une solution à la crise actuelle », dit un communiqué du Service européen pour l’action extérieure.
« Une assemblée constituante élue dans des circonstances douteuses et parfois violentes ne peut être considérée comme faisant partie d’une solution. »
A Paris, le Quai d’Orsay a lui aussi condamné les violences et appelé « à l’engagement urgent d’un dialogue national crédible, sincère et sérieux ».
De l’Argentine au Mexique, plusieurs nations d’Amérique latine ont condamné le scrutin de dimanche et beaucoup ont refusé d’en reconnaître les résultats.
« L’assemblée constituante va se mettre au travail immédiatement », a promis le vice-président du Parti socialiste, Diosdado Cabello lors d’un rassemblement politique organisé à Caracas.
Le Parti socialiste et ses alliés ont obtenu l’intégralité des 545 sièges que compte la nouvelle assemblée dotée de larges prérogatives: réécriture de la constitution, dissolution d’institutions existantes, comme l’assemblée nationale où l’opposition est majoritaire, ou encore limogeage de fonctionnaires appartenant à l’opposition.
« L’assemblée constituante ne résoudra aucun des problèmes du pays, elle va juste produire plus de crise », a estimé l’opposant Henrique Capriles lors d’une conférence de presse, avant d’appeler ses partisans à retourner manifester.
« A compter de demain (lundi), la lutte entre dans une nouvelle phase. »
Diosdado Cabello a laissé entendre que l’assemblée constituante siégerait dans la même enceinte que celle du congrès élu en 2015 au risque de provoquer des affrontements au Parlement.
« Ils nous ont fait sortir par la porte, nous revenons par la fenêtre », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. « Nous ne capitulerons jamais. Nous insistons et nous insisterons jusqu’à la victoire. Aujourd’hui, nous nous sentons victorieux. »
(Avec Fabian Cambero, Diego Ore et Hugh Bronstein, Gabriela Baczynska à Bruxelles, Marine Pennetier à Paris, Nicolas Delame et Arthur Connan pour le service français)