Le Sénat polonais adopte la loi sur l'Holocauste, colère d'Israël Le Sénat polonais adopte la loi sur l'Holocauste, colère d'Israël Le Sénat polonais adopte la loi sur l'Holocauste, colère d'Israël
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Le Sénat polonais adopte la loi sur l'Holocauste, colère d'Israël

Publié le 1 février 2018,
par Reuters.
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par Justyna Pawlak et Lidia Kelly

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VARSOVIE (Reuters) – Les sénateurs polonais ont voté jeudi un projet de loi instaurant des peines de prison pour quiconque laisserait entendre que la Pologne a été complice de l’Holocauste.

Le vote a suscité la préoccupation de Washington et provoqué la colère d’Israël, qui dénonce une « tentative de remettre en cause la vérité historique ».

Pour le parti au pouvoir à Varsovie, le PiS (Droit et justice), cette loi est nécessaire pour protéger la réputation de la Pologne et faire reconnaître que des Polonais non juifs tout comme des Juifs ont péri sous la férule des nazis.

Après le vote du Sénat, il reste maintenant au président Andrzej Duda à signer le texte dans un délai de 21 jours pour qu’il acquière force de loi.

Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a dit « comprendre l’émotion d’Israël » mais souligné qu’il était hors de question de restreindre « la liberté de débat autour de l’Holocauste ».

« La mort et les souffrances endurées dans les camps de concentration de l’Allemagne nazie ont été partagées par les Juifs, les Polonais et beaucoup d’autres nations, » a-t-il dit sur l’antenne de la chaîne de télévision publique TVP.

Avant le vote, la vice-Première ministre Beata Szydlo, l’une des figures du PiS, qui s’est faite l’avocate du projet de loi, avait déclaré : « Il est du devoir de tout Polonais de défendre le renom de la Pologne. Tout comme les Juifs, nous avons été des victimes ».

En vertu du texte de loi, les contrevenants seront passibles de trois ans de prison s’ils mentionnent la formule « camps de la mort polonais », mais le projet de loi stipule que les recherches scientifiques sur la Seconde Guerre mondiale n’y seront pas assujetties.

Israël « s’oppose catégoriquement » à l’adoption de ce projet de loi, a dit le ministère israélien des Affaires étrangères. « Israël considère avec la plus grande gravité toute tentative de remettre en cause la vérité historique. Aucune loi ne modifiera les faits », a dit sur Twitter le porte-parole du ministère, Emmanuel Nahshon.

Le ministre israélien du logement, Yoav Galant, l’un des ministres à avoir dénoncé le projet de loi, a déclaré au micro de la radio de l’armée israélienne que pour lui, il s’agissait « de fait de la négation de l’Holocauste ».

SIX MILLE SEPT CENTS « JUSTES »

Pour le département d’Etat américain, ce texte « risque de nuire à la liberté d’expression et aux échanges entre universitaires ».

« Nous sommes préoccupés par les répercussions que ce projet de loi, s’il est définitivement entériné, risque d’avoir sur les intérêts et les relations stratégiques de la Pologne », a déclaré Heather Nauert, porte-parole du département d’Etat.

Le ministère polonais des Affaires étrangères a réagi en assurant que cette loi ne restreignait aucunement la liberté d’expression et a dit son espoir que les relations avec Washington n’en soient pas affectées.

Les Polonais se battent depuis des années contre le recours à des formules comme « camps de la mort polonais », qui laissent penser que la Pologne est au moins pour partie responsable des camps d’extermination ouverts par les nazis.

De tels camps, comme Auschwitz, Treblinka ou Sobibor, avaient été construits et utilisés par les nazis après l’invasion en 1939 de la Pologne, où vivait alors la plus grande communauté juive d’Europe, avec 3,2 millions de personnes.

Plus de trois millions de ces 3,2 millions de Juifs polonais ont été exterminés par les nazis, soit la moitié des Juifs massacrés durant l’Holocauste.

Selon les chiffres du musée du mémorial américain de l’Holocauste, les Allemands ont également tué au moins 1,9 million de civils polonais non juifs durant la Seconde Guerre mondiale.

Selon le centre israélien Yad Vashem, entre 30.000 et 35.000 juifs, soit environ 1% de la communauté juive de Pologne, ont été sauvés grâce à l’aide de Polonais. Plus de 6.700 Polonais, soit le contingent le plus important d’un pays, ont été qualifiés de « Justes parmi les Nations ».

Mais ces dernières années, un débat public douloureux s’est engagé en Pologne sur la culpabilité et la réconciliation touchant à l’Holocauste, après publication de recherches montrant que certains Polonais avaient pris part aux atrocités commises par les nazis.

Nombre de Polonais refusent d’accepter ce type de recherches, qui remettent en cause l’idée que leur pays a été uniquement victime.

(Avec Dan Williams à Jérusalem, Mohammad Zargham à Washington, Gabriela Baczynska à Bruxelles et Anna Koper et Pawel Florikiewicz à Varsovie, Eric Faye et Gilles Trequesser pour le service français)

Le Sénat polonais adopte la loi sur l'Holocauste, colère d'Israël
Les sénateurs polonais ont voté jeudi un projet de loi instaurant des peines de prison pour ceux qui laisseraient entendre que la Pologne a été complice de l'Holocauste, ce qui a suscité la préoccupation de Washington et provoqué la colère d'Israël, qui dénonce une "tentative de remettre en cause la vérité historique".