Le tissu technique relance l’industrie textile en France
Grace aux tissus intelligents, le textile français reprend des couleurs. Longtemps cantonnés à des secteurs de pointe, les textiles techniques trouvent aujourd’hui des applications de plus en plus diversifiées. Selon les experts, ce n’est qu’un début.
Des tissus lumineux capables de soigner la jaunisse du nourrisson, une casquette anti-migraine, des vêtements connectés, d’autres qui reprennent leurs formes après usage, un clavier d’ordinateur que l’on peut rouler dans sa poche ; ce sont la quelques unes des applications du textile technique.
50% des emplois du textile
Le textile technique est aujourd’hui une activité en pleine croissance. Cette dynamique booste toute l’industrie du secteur. Le chiffre d’affaires des tissus techniques représente 40% du volume total de l’industrie textile en France. Il s’élève à 5,86 milliards d’euros annuels dont un tiers est réalisé à l’exportation. Avec 26 000 salariés, principalement dans le Nord et le Rhône, cette activité emploie 50% des effectifs du textile de l’hexagone.
Les innovations du textile technique sont de plus en plus sophistiquées. Elles s’appliquent à des domaines toujours plus nombreux. Dans des années 1960, la part de fibres comprise dans le fuselage d’un avion s’élevait à 1%, elle est aujourd’hui d’environ 50%. On trouve des textiles techniques dans l’habitat, les transports, la santé, l’espace, l’automobile, l’agriculture et bien évidemment l’habillement.
C’est à la fin des années 1990, que des industriels du textile traditionnel commencent à s’intéresser de près aux textiles techniques. Subissant de plein fouet la concurrence des pays émergeants, l’industrie textile française est en plein marasme. Entre 1990 et 2010, la production hexagonale enregistre une baisse de 70%. Dans ce contexte, le textile technique constitue pour beaucoup une porte de sortie. En comparaison du tissu traditionnel, c’est un marché de niche. Les quantités sont faibles, mais la forte valeur ajoutée des produits permet de mieux résister face à la mondialisation.
La France au deuxième rang européen
Ce sont principalement les petites entreprises traditionnelles qui opèrent une reconversion. A l’image du lyonnais Brochier, spécialiste de la soie, qui à partir des années 2000, se lance dans le tissu intelligent. Investissant dans la recherche, cette PME met au point un tissu luminescent, en fibre optique, qui trouve de nombreuses applications dans la santé, le mobilier urbain et le luxe. Autre exemple, dans le Nord, Damart, le créateur du fameux Thermolactyl, lance le premier tissu rafraichissant. Un textile en polyester retenant de microscopiques cristaux qui au contact de la chaleur humide du corps diffuse du froid.
En Europe, Le tissu technique est en train de relancer un secteur que l’ont croyait définitivement sinistré. Et la France tire son épingle du jeu. L’hexagone est le deuxième producteur européen de textiles techniques et le quatrième mondial derrière le Japon, les Etats-Unis et l’Allemagne. Les perspectives d’avenir permettent d’être optimiste. En 2011, la consommation mondiale de textiles techniques s’élevait à 130 milliards de dollars, les experts tablent sur 175 milliards en 2020 et 2000 milliards en 2030. D’autant que les secteurs d’avenir comme la protection de l’environnement, l’isolation, l’énergie, sont fortement demandeurs.
Des tissus contre le cancer
Le futur passe par l’innovation, tous les spécialistes le répètent. Aujourd’hui, des chercheurs travaillent sur un tissu lumineux pouvant être utilisé dans le traitement de certains cancers de la peau. Dans l’agriculture, on améliore les bâches qui protègent les cultures des insectes. Dans l’aérospatiale, on met au point des boucliers thermiques en tissu, afin de ramener des objets de l’espace dans l’atmosphère. Dans le domaine de la sécurité, la combinaison anti-feu des pompiers se dote de nouvelles fonctions, comme des tissus détecteurs de fumée ou de gaz et des tissus connectés capables d’alerter les centres de secours.
Le textile est en train de réussir sa mue. Cette industrie que l’on croyait réservée aux rétrospectives historiques devient un secteur de pointe. Aujourd’hui, quand des industriels chinois visitent les installations textiles du Nord, ce n’est plus pour rapatrier du matériel dans les ateliers désaffectés, mais pour prendre des commandes. La Chine est en effet le premier consommateur mondial de textiles techniques. Voilà qui pourrait donner un nouveau sens à la mondialisation.
Sources photos : www.buzzly.fr / www.stylelistquebec.ca