L’Organisation de la Francophonie change de visage
Il n’a pas été aisé à Michaëlle Jean de parvenir à ses fins. En campagne depuis plus d’un an, elle a finalement hérité d’une victoire à l’arrachée pour devenir le nouveau visage de la Francophonie. C’est en se battant contre les traditions qu’elle a réussi à se hisser à la tête d’une organisation vue comme « un Commonwealth à la française ». Elle quitte ainsi son poste d’envoyée spéciale de l’Unesco en Haïti pour suivre l’avancée des travaux de reconstruction consécutifs au terrible séisme de janvier 2010.
Michaëlle Jean a connu l’exil alors qu’elle n’avait que onze ans. Sa famille a fui Haïti pour se réfugier au Québec afin d’échapper au régime dictatorial des Duvalier. Son père, directeur d’école et opposant politique, a été arrêté et torturé pour avoir contesté la politique du gouvernement. Quand il sort de prison, il est défiguré, ses vêtements tâchés du sang de son codétenu, mort en détention.
Dame de cœur
L’exil est en réalité une chance pour la famille Jean. Au Québec, les enfants poursuivent leurs études et c’est avec une maîtrise en poche que la jeune Michaëlle Jean se lance dans une brillante carrière de journaliste à la télévision publique canadienne. Elle devient alors la première journaliste noire à la télévision publique canadienne, avant d’être nommée gouverneure générale du Canada en 2005 par le Premier ministre de l’époque. Représentante de la reine Elisabeth, chef d’Etat en titre, et surnommée «Petite reine», Michaëlle Jean occupe ce poste jusqu’en 2010. Devenue chancelière de l’université d’Ottawa, elle a mis en place une politique de coopération éducative très active avec les universités africaines, la prédestinant à son poste actuel.
Dame de fer
Lors de sa campagne pour la direction de l’OIF, elle a dû essuyer beaucoup de critiques, notamment certaines l’accusant de manquer d’expérience. Pourtant, ses proches expliquent sa venue à la francophonie par la découverte de l’Afrique, qui l’a souvent reçue, pendant ses déplacements sur le continent, comme une sœur. Elle s’est lancée dans la campagne, consciente de sa connaissance limitée du contexte politique africain, notamment par rapport à ses quatre concurrents.
Elle les a affrontés en plaidant pour une « francophonie moderne et tournée vers l’avenir ». Elle a voyagé dans tous les pays africains qui comptent pour rencontrer les chefs d’Etat et les représentants de la société civile.
Michaëlle Jean a été nommée à la tête de l’OIF par consensus le 30 novembre dernier et a pris ses fonctions le 5 janvier dernier. François Hollande, le président français, avait attiré l’attention de ses pairs francophones sur les qualités de sa candidature, après avoir proposé le poste au Burkinabé Blaise Compaoré, ce dernier l’ayant refusé.
On annonce un milliard de francophones en 2060 ! Il faudra, pour l’OIF, ne pas rater cette marche en avant. Le challenge qui attend Michaëlle Jean est grand ! On lui souhaite bonne chance !
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