José Mujica : le président le plus pauvre du monde José Mujica : le président le plus pauvre du monde José Mujica : le président le plus pauvre du monde
Biographie

José Mujica : le président le plus pauvre du monde

Publié le 26 janvier 2015,
par VisionsMag.
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Le 30 novembre 2014, les élections présidentielles uruguayennes ont désigné Tabaré Vazquez, candidat de la gauche, pour succéder à José Mujica. A 77 ans, José Mujica (Front large de gauche) a décidé de prendre sa retraite au terme d’une vie politique hors du commun.

« Je devrais croire en Dieu », lance José Mujica aux journalistes de l’AFP venus l’interviewer chez lui en août 2014. Dans la bouche de cet ex militant marxiste, la formule peut prêter à sourire. Elle souligne l’exceptionnelle destinée de cet homme. Au moment où son mandat expire, le mythe de Mujica égale celui du brésilien Lula ou du Vénézuélien Chavez. Célébré comme un héros, Mujica est certainement l’homme d’Etat le plus atypique d’Amérique du sud.

Grenade et mitraillette

Lorsqu’il est arrêté, en aout 72, par la police uruguayenne, Mujica dort dans la rue avec une mitraillette et une grenade cachées sous son manteau. Mujica est à l’époque l’un des six hommes les plus recherchés par les autorités de Montevideo. Il fait partie des dirigeants des « Tupamaros », un groupe de lutte armée de la gauche radicale. Les Tupamaros se sont notamment distingués, le 8 octobre 1969 (date anniversaire de la mort de Che Guevara), en se rendant maîtres de la ville industrielle de Pando à quelques kilomètres de la capitale. Si Mujica a maintes fois condamné la lutte armée, il n’a jamais formulé de regret quant à son engagement. « Quand on arrête de lutter, on arrête d’être libre », aime-t-il à répéter.

Après l’ «aventure » de la clandestinité, les années de prisons transforment sa vie en une longue épreuve. Le pouvoir dictatorial veut faire un exemple. Mujica passe onze ans dans une cellule minuscule, parfois au fond d’un puits, subissant de nombreuses tortures. Le romancier Mauricio Rosencof, qui a partagé sa cellule, rappelle que les détenus devenaient fous tant les conditions étaient extrêmes. Pour s’empêcher de crier, Mujica met des pierres dans sa bouche. Après plusieurs années, on lui permet de lire. Il se met alors à dévorer des ouvrages de chimie, qu’il recopie pour aider son esprit à se restructurer.

Le président le plus pauvre du monde

Ce parcours va faire de Mujica un président hors norme. On retrouve dans sa manière de gouverner la radicalité de sa jeunesse, mais avec des méthodes plus douces. Mujica refuse ainsi de vivre dans le palais présidentiel de Montevideo. Il lui préfère la petite maison des faubourgs de la capitale qu’il partage avec sa femme, Lucia Topolansky, une ancienne militante des Tuparamos. Ils ont créé ensemble un commerce d’horticulture. C’est dans cette petite exploitation que le président reçoit ses visiteurs au coin d’une table. Pour ses transports, il utilise sa Volkswagen Beetle vieille de vingt-cinq ans. Ne gardant de son traitement de président que ce qu’il estime nécessaire, il reverse 90% de son salaire à des œuvres caritatives. Ce style correspond aux convictions de l’homme. Celui qui, enfant, ramassait du bois, vendait des fleurs et péchait des poissons dans les ruisseaux pour aider sa famille, ne cesse aujourd’hui de vilipender le consumérisme. Selon lui, l’égoïsme engendré par le désir de consommation est responsable de ce qu’il appelle : « la pauvreté mentale ». Mettant ses actes en accords avec ses paroles, il a ainsi opté pour un style de gouvernance qui lui a valu le surnom du « président le plus pauvre du monde ». Une formule lancée par le quotidien espagnol « El Mundo » et reprise ensuite par toute la presse internationale.

Avortement, mariage gay et cannabis

Si ce style a contribué à sa légende, Mujica doit aussi sa popularité aux nombreuses réformes qu’il a engagées dans son pays. Sous sa présidence, l’Uruguay a profondément changé. Mujica est ainsi à l’origine de la loi d’octobre 2012 qui autorise l’avortement. En avril 2013, l’Uruguay reconnaît le mariage entre personnes de même sexe. Une première dans la très catholique Amérique du sud. Enfin, par la loi du 6 mai 2014, l’Uruguay légalise le cannabis et charge l’Etat d’en réguler la production.

Au-delà de ces innovations sociétales, Mujica a aussi obtenu des résultats probants pour l’économie de son pays. Avec une croissance moyenne de 6,4%, les salaires ont progressé de 36%. Le chômage atteint son plus faible record historique (5,3%). Le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté a été divisé par trois. De plus, résultat qui fait la fierté de Mujica, l’analphabétisme a quasiment disparu du pays. Après cinq ans à la tête de l’Uruguay, Mujica est toujours au sommet dans les sondages d’opinions. Et si la loi l’empêche de briguer un nouveau mandat, c’est avec le sentiment du devoir accompli qu’il se retire.

José Mujica : le président le plus pauvre du monde
A 77 ans, José Mujica a décidé de prendre sa retraite au terme d’une vie politique hors du commun.

« Hijos de puta »

Il projette maintenant de retourner à sa passion, la culture des fleurs, et « comme tous les vieux », dit-il, de passer sa vie à donner des conseils. Mais à 77 ans, José Mujica est un vieil homme toujours vert. Sa réaction après les sanctions infligées au joueur uruguayen Luis Suarez, lors du mondial Brésilien, le prouve. « Los de la FIFA son una manga de viejos hijos de puta » (traduction facultative) a-t-il en effet déclaré. Une formule qui a fait flores en étant reprise par un groupe de rap. Comme quoi on peut être un vieux sage et avoir la langue bien pendue.

Sources des photos : huffingtonpost.com / caracol.com.co