Négociations de paix sur la Syrie: nouveau format, même défi
par Tom Miles
GENEVE (Reuters) – Les négociateurs de l’opposition syrienne et les représentants du régime de Damas se retrouvent mardi à Genève pour cinq jours de négociations dans un nouveau format mais avec le même défi: enclencher un processus de paix en Syrie.
Le calendrier resserré de ces rencontres et le récent accord sur un agenda réduit à quatre questions essentielles devraient favoriser le dialogue entre les parties en guerre, estime l’émissaire des Nations unies, Staffan de Mistura, dont les efforts ont été souvent infructueux depuis sa désignation en juillet 2014.
Sous la pression de leurs alliés respectifs, gouvernement syrien et opposition ont été contraints de s’accorder sur des grands thèmes de négociation : une nouvelle constitution, une réforme de la gouvernance, de nouvelles élections et la lutte contre le terrorisme.
Si le périmètre des discussions a enfin été fixé, en revanche les deux camps ont des interprétations radicalement divergentes quant au sens que l’un et l’autre attache à chaque sujet.
Le régime syrien, soutenu par la Russie et l’Iran, est impatient de discuter de la question du « terrorisme », terme fourre-tout par lequel il désigne tous ses adversaires, modérés comme islamistes.
L’opposition réclame toujours le départ de Bachar al Assad, une exigence qui n’est plus cohérente avec le rapport des forces sur le terrain depuis que l’intervention russe a permis un rétablissement spectaculaire d’un gouvernement qui paraissait, un temps, proche de la chute.
Affichant une attitude a priori peu conciliante, Bachar al Assad expliquait la semaine passée à la chaîne biélorusse ONT que ces négociations « étaient simplement pour la presse » et que « rien d’important » ne pourrait en sortir.
CHANGEMENT DE FORMAT
Staffan de Mistura veut pourtant voir un signe dans l’imposante délégation de 18 membres dépêchée par Damas et conduite par Bachar al Djaafari.
Le diplomate onusien a réfuté l’idée que ce nouveau tour de table ne soit qu’un écran de fumée dont le gouvernement syrien entend se servir pour poursuivre la guerre.
« Les événements sur le terrain » – périphrase pour désigner la guerre en langage de l’Onu – ne fourniront pas la solution politique que souhaitent les parties engagées dans ce conflit insoluble, a-t-il dit.
« Tout est lié. D’importantes réunions ont lieu. Cela va avoir lieu. Des discussions ont lieu dans les capitales. Elles ont une influence sur ce dont nous discutons. Mais je ne vais pas en dire plus pour l’instant », a-t-il ajouté.
Les négociations de Genève reprennent après un accord entre la Russie, la Turquie et l’Iran pour créer des « zones de désescalade » afin de réduire la violence des affrontements sur le terrain.
L’opposition syrienne estime que cette initiative a pour but de favoriser les progrès des forces pro-Assad sur le terrain et affirme qu’elle ne peut être durable qu’adossée à une solution politique.
« La route de la liberté pour la Syrie passe par Genève », a déclaré Nasr al Hariri, un négociateur de l’opposition, à son arrivée en Suisse.
« C’est pour cela que nous sommes venus ici pour négocier une solution politique et c’est pour cela qu’Assad a peur de ce processus. Il a peur de s’engager dans la recherche d’une solution politique », a-t-il ajouté.
Jusqu’à présent, toutes les tentatives menées à Genève se sont soldées par des échecs, se résumant à des messes médiatiques ciblées par les critiques.
Les choses peuvent-elles être différentes cette fois ? « Même la taille des salles est plus petite, le format des rencontres sera un peu plus interactif et proactif et plus fréquent. Nous choisirons certains sujets sur lesquels nous concentrer afin de faire bouger les choses », a promis De Mistura.
(Pierre Sérisier et Tangi Salaün pour le service français)