AMSTERDAM (Reuters) – Le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, qui a repoussé la menace Geert Wilders aux élections législatives de mercredi, va devoir à présenter rebâtir une coalition stable sur la base d’un Parlement fragmenté.
Treize partis différents seront représentés dans la future chambre, où il faut le soutien de 76 députés pour s’assurer la majorité absolue.
Au pouvoir depuis 2010, le chef de file du Parti libéral (VVD) ne pourra sans doute plus s’appuyer sur ses partenaires travaillistes du PvdA, les grands perdants du scrutin dont le groupe parlementaire a fondu de 29 sièges, passant de 38 à 9 députés.
Associé à Rutte depuis les législatives de 2012, le parti de Jeroen Dijsselbloem, ministre des Finances dans le gouvernement sortant et président de l’Eurogroupe, a payé le prix fort de sa participation gouvernementale. Ses électeurs ont lourdement sanctionné le soutien qu’il a apporté aux politiques d’austérité.
Le VVD a perdu lui-même huit sièges, passant à 33 députés, mais demeure la première force parlementaire.
Dans les prochains jours, Edith Schippers, ministre de la Santé choisie par le VVD pour conduire des discussions exploratoires, va enchaîner les consultations avec les formations parlementaires.
Le Premier ministre ayant exclu, à l’unisson des autres dirigeants politiques, de faire alliance avec le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders (20 élus), il devrait vraisemblablement se rapprocher des chrétiens démocrates du CDA (19 députés) et des centristes de Démocrates 66 (19 élus aussi).
Une telle alliance disposerait de 71 sièges; il en manquerait cinq. Et plusieurs options, dont celle des écologistes du Groen Links (14 députés), sont possibles, mais toutes imposeront des compromis difficiles sur des thèmes cruciaux de la mandature à venir.
IMMIGRATION ET DOUBLE NATIONALITÉ
Le VVD, qui s’est droitisé sous l’effet d’une campagne électorale dominée par les questions d’identité, veut renforcer les contrôles sur l’immigration.
Le Groen Links prône une politique inversée, insistant sur la nécessité de rétablir l’image des Pays-Bas en havre de la tolérance.
Les chrétiens démocrates du CDA prônent pour leur part la suppression de la double nationalité afin d’accélérer l’intégration. Plusieurs partis sont hostiles à cette mesure.
RETRAITES ET PERSONNES AGÉES
Dans le cadre de sa politique d’austérité, le gouvernement sortant a repoussé de 65 à 67 ans l’âge de départ à la retraite et réduit les dépenses de santé pour les personnes âgées. Le parti 50Plus, qui se présente comme la formation des retraités, veut revenir sur ces deux réformes. Il comptera quatre élus dans la future assemblée.
CLIMAT ET ÉNERGIES FOSSILES
Mark Rutte a réduit les dépenses publiques en matière de lutte contre le changement climatique et de développement des énergies renouvelables. Il a parallèlement rouvert des centrales thermiques au charbon.
Les écologistes de Groen Links réclament la fermeture de ces centrales, qui rejettent en quantité des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, et demandent une rallonge de 8 milliards d’euros pour les énergies vertes.
SECURITE SOCIALE
Le gouvernement Rutte a mis en place une franchise en matière de remboursement des dépenses de santé, c’est-à-dire une contribution individuelle obligatoire avant prise en charge par l’assurance maladie. En 2016 comme pour 2017, elle a été fixée à 385 euros par an. Les écologistes et le parti 50Plus réclament sa suppression.
FISCALITÉ
La baisse des impôts figure dans le programme du VVD de Rutte et du CDA de Sybrand Buma. Le Groen Links milite lui pour l’introduction d’une « taxe pollution » et veut relever de 10% le taux d’imposition pour les revenus supérieurs à 150.000 euros par an.
EUTHANASIE ET BIOÉTHIQUE
Depuis des décennies, les centristes du D66 ont été en pointe de réformes sociétales comme la dépénalisation de certains stupéfiants ou la reconnaissance du droit au mariage des couples homosexuels.
Ils réclament aujourd’hui un droit à l’euthanasie pour les individus qui, sans être malades, arriveraient à la conclusion que leur vie est « achevée ». Le CDA et deux autres partis chrétiens s’opposent catégoriquement à cette réforme.
(avec Stephanie van den Berg et Toby Sterling; Henri-Pierre André pour le service français)