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Peu d’hommes ont autant marqué l’histoire du féminisme au Moyen Orient que Qasim Amin. Né le 1er décembre 1863, il y a 150 ans, ce juriste égyptien du 19ème siècle reste l’un des principaux penseurs de la cause féministe. Son ouvrage, publié en 1899, The Liberation of Women (Tahrir al-mar’a ), est à l’origine de controverses qui restent, encore aujourd’hui, vivaces.
Qasim Amin dresse un portrait très noir de la condition de la femme dans la société égyptienne du 19ème siècle. Pour lui, elle est considérée comme un être inférieur, sans droit, sans liberté. Ses idées détonnaient dans le paysage intellectuel de l’époque : il prônait l’éducation pour les filles, des lois plus égalitaires, notamment pour le divorce, la polygamie et la répudiation, il suggéra que les femmes pouvaient aussi être docteurs et enseignantes.
Un féministe avant gardiste!
Aussi étrange que cela puisse nous paraître, Qasim Amin basait son argumentaire féministe sur le patriotisme égyptien. Avoir des femmes à l’égal des hommes était pour lui une condition nécessaire à la bonne éducation des enfants et par là, la grandeur future de la nation. Des idées que l’on retrouve dans les revendications des manifestants de ces derniers mois en Egypte.
Une pensée peu reconnue, et souvent décriée!
Le jeune juge n’est jamais devenu un héros national, bien qu’il ait ses admirateurs. Mort à 45 ans, il reste une référence dans la pensée sur les droits des femmes au Moyen Orient. C’est seulement en 1999, pour la première fois, que le gouvernement égyptien lui a reconnu un statut de philosophe et a organisé un cycle de conférences de 6 jours sur son œuvre.
Il a cependant de nombreux détracteurs. Certains lui reprochent de vouloir corrompre la société égyptienne avec des pensées venues de l’Occident (il avait fait une partie de ses études en France). D’autres lui reprochent de plaider pour la sécularisation des mœurs. Même si Qasim Amin affirme très clairement que l’Islam n’est pas responsable de ce qu’il appelle «l’asservissement des femmes », les cléricaux en dressent parfois le portrait d’un dangereux laïc.
Place Tahrir et les revendications féministes aujourd’hui au Moyen Orient!
Le court régime des Frères Musulmans (2012-2013) avait été source de vives tensions. Comme ailleurs au Moyen Orient, les droits des femmes avaient été remis en question, au grand dam d’une partie de la société (Suppression de la planification familiale, autorisation de l’excision, campagne contre le travail des femmes…). L’Egypte a toujours eu un rôle de catalyseur et de vitrine des mouvements citoyens au Moyen Orient, et ce que certains auraient pu appeler « un retour en arrière » avait fait des émules dans toute la région.
Les protestations de juin et juillet 2013 ont mis fin au mandat de Mohammed Morsi, et les espoirs d’amélioration de la situation féminine ont été exprimés dans les revendications de la place Tahrir. Aujourd’hui ce lieu emblématique des manifestations en Egypte est le théâtre quotidien d’agressions sexuelles, en marge des manifestations. Cet épicentre des révolutions porte pourtant le nom de l’ouvrage de Qasim Amin (Tahrir signifie Libération).
Un anniversaire à fêter?
Le 1er décembre 2013, l’Egypte aura l’occasion de fêter les 150 ans de la naissance de Qasim Amin. S’il est certain que de nombreux Egyptiens le connaissent, auront-ils l’opportunité, la liberté et l’envie de sortir dans la rue pour cet événement ?
Les références des photos:
Portrait : http://historianforum.blogspot.fr/2012/08/qasim-amin-egyptian-reformer.html
Couverture de Liberation of Women : http://www.myhero.com/go/hero.asp?hero=Qasim_Amin_Egypt07