Tensions accrues au Yémen après les missiles tirés sur Ryad
RYAD/SANAA (Reuters) – L’un des missiles tirés sur l’Arabie saoudite par les rebelles chiites houthis, qui contrôlent le nord du Yémen et la capitale Sanaa, a fait pour la première fois des victimes, dimanche à Ryad, un incident qui pourrait provoquer une escalade du conflit.
Les Houthis ont promis lundi de continuer à tirer des missiles sur l’Arabie saoudite tant que la coalition mise en place il y a trois ans par Ryad poursuivra ses bombardements aériens.
La coalition accuse les rebelles d’utiliser des missiles fabriqués en Iran et se réserve le droit de répondre à l’Iran « dans un temps et de manière appropriés » afin de protéger l’Arabie saoudite, a affirmé le porte-parole de la coalition, le colonel Tourki al Malki.
Trois missiles ont été détruits au-dessus de Ryad dimanche peu avant minuit, ont annoncé les forces saoudiennes. Des débris sont tombés sur une maison, faisant un mort et deux blessés.
A Sanaa, la capitale yéménite, un haut responsable politique du mouvement houthi a salué lundi matin cette attaque menée à la veille du troisième anniversaire de l’entrée en guerre de l’Arabie saoudite et de ses alliés arabes.
« S’ils veulent la paix, comme nous l’avons déjà dit, qu’ils arrêtent d’abord leurs bombardements aériens et nous, nous arrêterons nos tirs de missiles », a affirmé Saleh al Samad devant une foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes. « S’ils poursuivent leurs bombardements, nous avons le droit de nous défendre avec tous les moyens à notre disposition. »
« DANGEREUSE ESCALADE »
La coalition anti-houthis conduite par les Saoudiens a mené en trois ans de nombreuses frappes aériennes au Yémen, faisant des centaines de victimes civiles, notamment dans des hôpitaux, des écoles et des marchés.
Le conflit a fait environ 10.000 morts, selon les Nations unies. Il a déplacé plus de trois millions de personnes et menace d’une famine généralisée le pays le plus pauvre de la péninsule arabique.
L’an dernier, les Houthis ont tiré en direction de Ryad plusieurs missiles qui ont été interceptés et n’ont pas fait de victimes. La coalition arabe a riposté en imposant un blocus aux zones rebelles, partiellement levé après les protestations de l’Onu.
Tourki al Malki a accusé l’Iran de fournir des armes aux Houthis et a affirmé que la communauté internationale devait « travailler conjointement pour lutter contre cette dangereuse escalade » qui menace la sécurité dans la région et au-delà.
Des experts indépendants de l’Onu ont rapporté en janvier que les missiles tirés par les Houthis qu’ils ont examinés avaient été fabriqués en Iran.
Via un communiqué, le Pentagone a accusé l’Iran d’exacerber le conflit et la souffrance du peuple yéménite en fournissant des armes sophistiquées aux Houthis.
Fournir des armes à des acteurs non gouvernementaux qui peuvent être utilisés contre des Etats est « irresponsable et contraire à la loi », a affirmé pour sa part dans un communiqué le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, semble-t-il en référence à l’Iran.
L’armée saoudienne est dépendante d’importants contrats établis avec des industriels occidentaux. La guerre au Yémen a été évoquée par le prince héritier saoudien Mohamed ben Salman avec le président américain Donald Trump et la Première ministre britannique Theresa May lors de visites officielles ce mois-ci.
Des sources diplomatiques et politiques ont annoncé que l’Arabie saoudite et le mouvement houthi menaient des négociations secrètes pour tenter de mettre fin à la guerre au Yémen.
(Marwa Rashad, Sarah Dadouch et Abdulrahman al-Ansi, avec Aziz El Yaakoubi et John Irish, Jean Terzian pour le service français)