Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé
Biographie

Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé

Publié le 14 septembre 2016,
par VisionsMag.
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Symbole de la lutte contre le mariage forcé, Sonita Alizadeh, jeune afghane de 19 ans, est certainement la rappeuse la plus téméraire au monde. Grâce au rap et à son tube « Brides for sale » (Mariées à vendre), vu plus de 500.000 fois sur YouTube, Sonita a ainsi pu échapper à son destin.

Une enfance en plein régime Taliban

Sonita Alizadeh, dont le prénom signifie « hirondelle », est née en 1996 à Hérat, une ville de l’ouest de l’Afghanistan proche de la frontière iranienne. Sonita est issue d’une famille très nombreuse dans un pays où le sort réservé aux femmes est souvent révoltant. Sa mère, mariée de force, n’était âgée que de 12 ans lors de son mariage. L’enfance de Sonita se résume à deux mots : faim et peur. En effet, en 1996, les Talibans s’emparent du pouvoir et appliquent un code très restrictif de la charia : il est notamment interdit aux femmes d’être scolarisées, d’exercer une profession ou de sortir de chez elles sans être accompagnées.

Un mariage forcé à 9 ans…

A 9 ans, Sonita perd son père et dans le même temps, sa mère lui annonce qu’elle lui a trouvé un mari ; bien que l’âge légal du mariage soit fixé à 16 ans en Afghanistan… In extremis, le mariage n’aura pas lieu car la famille de Sonita décide de fuir le régime des Talibans, direction l’Iran. En chemin, la famille est arrêtée par des Talibans qui menacent de voler Sanita contre de l’argent. Pour la première fois de sa vie, la fillette prend conscience de son statut de marchandise. Sa mère la laisse à Téhéran dans un centre pour enfants réfugiés où elle apprend à lire et écrire. Sans papiers, Sonita ne peut travailler, elle est alors employée à mi-temps par le centre comme femme de ménage.

Le rap : une révélation

Un jour, elle entend à la radio une musique qui la subjugue bien qu’elle n’en comprenne pas les paroles : c’est du rap ! Le rythme, le débit et la rage de ce style musical fait écho à toute sa colère refoulée au fond d’elle-même. Rongée par l’injustice que vivent toutes ces jeunes filles promises, contre leur gré, à des inconnus, Sonita commence à écrire et chante ses textes à ses amies du centre. Sonita a trouvé sa voie : elle veut devenir rappeuse afin de dénoncer les mariages forcés. Elle décide alors de faire appel à un producteur qui accepte d’enregistrer une démo.

Malheureusement, son frère débarque un jour dans sa chambre pour la marier : il a besoin de 9.000 $ pour se payer une femme et compte trouver cet argent en mariant sa sœur. Dans le même temps, Rokhsareh Ghaem Maghami, réalisatrice iranienne, découvre le rap de Sonita et décide d’en faire un film. La réalisatrice donne 2.000 $ à la famille de Sonita en échange d’un sursis de 6 mois afin de pouvoir tourner le film.

Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé
Grâce au rap, la jeune Afghane a échappé de justesse au mariage forcé et se bat aujourd’hui pour la cause des femmes.
Sonita Alizadeh : le rap comme rempart au mariage forcé

Un succès immédiat sur YouTube

Rokhsareh tourne le clip de « Mariées à vendre » dans lequel Sonita y apparaît en mariée, le visage tuméfié et un code-barre tatoué sur le front. A peine deux semaines après sa mise en ligne, le clip est un succès : il est vu plus de 6.000 fois, partagé et relayé partout dans le monde. Sonita est alors contactée par Strongheart, une association humanitaire américaine, qui lui propose une bourse d’études aux Etats-Unis. Toutefois, le plus difficile reste encore à faire pour Sonita : elle doit rentrer en Afghanistan afin d’obtenir un passeport. L’obtention d’un visa s’avère être un enfer administratif pour la jeune femme qui réussit malgré tout à s’enfuir pour l’Amérique.

Pour la première fois, Sonita va à l’école et souhaite étudier le droit afin de devenir avocate pour le droit des femmes. Parallèlement, elle continue à se battre pour son pays à travers plusieurs engagements : le projet « Sonita’s campaign » de l’ONG Strongheart et le mouvement « Girls are note brides ». Le documentaire Sonita, tourné par la cinéaste Rokhsareh Ghaem Maghami a obtenu le grand prix du jury au dernier festival de Sundance, fin janvier 2016.

Dans un pays comme l’Afghanistan où selon l’ONU 60 à 80 % des Afghanes sont mariées de force, le parcours de Sonita fait figure de symbole et, espérons-le, donnera espoir aux nombreuses femmes contraintes aux mariages forcés.

Photo : actuelles.ma / www.pri.org

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