Ces grands patrons qui ont l’oreille de François Hollande
Quelle que soit leur appartenance politique, les présidents français ont toujours su se ménager de précieuses relations avec le milieu patronal. Relais incontournables entre la politique et l’économie, médiateurs ou messagers lorsqu’une réforme est envisagée, hommes de confiance tenant parfois le rôle d’éminences grises, ces interlocuteurs pas comme les autres occupent une place non négligeable au sein de la politique française. François Hollande ne dérogeant pas à la règle, quels sont les patrons qui peuvent se vanter d’avoir son écoute ?
Pierre Pringuet, au cœur de l’Afep
Ce n’est qu’en 2012 que Pierre Pringuet, ancien rocardien et PDG de Pernod Ricard, fait la connaissance du chef de l’Etat. La très puissante et influente Afep (association française des entreprises privées), représentant les patrons du CAC 40 et les grandes entreprises françaises, se cherche alors un directeur après la démission de Maurice Levy. Le consensus s’établit autour de la personne de Pierre Pringuet, réputé tant pour sa discrétion que pour son efficacité. Très vite, des contacts s’établissent avec François Hollande, et un lien de confiance s’établit entre les deux hommes. Pierre Pringuet est depuis lors régulièrement reçu en tête à tête à l’Elysée, privilège rare pour un grand patron, dont la proximité avec le président suscite la méfiance de certains membres de l’Afep. Un exercice d’équilibriste qui pour le moment ne semble pas mettre le patron de Pernod Ricard en difficulté. « L’Afep n’est ni de droite ni de gauche, elle est du parti des entreprises », affirme-t-il lorsqu’il en prend la tête. Sa prise de position en faveur des « Pigeons », ce mouvement d’entrepreneurs contestataires, a suffi à démontrer son indépendance vis-à-vis du pouvoir, ce qui ne l’empêche pas de s’entourer, au sein de l’Afep, de personnes « hollando-compatibles » telles que Paul Hermelin.
Paul Hermelin, dernier patron PS ?
Pierre Pringuet craignait-il de se retrouver isolé au milieu d’une majorité de patrons de droite ? Le fait est que dès sa prise de fonction à l’Afep, il s’empresse d’y nommer Paul Hermelin au conseil d’administration. Seul patron du CAC 40 à avoir la carte du Parti Socialiste, le PDG de Cap Gemini, entreprise de services numériques embauchant 130 000 personnes et réalisant 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires, n’était toutefois pas foncièrement proche de François Hollande. Pourtant, les deux hommes se côtoient depuis 1981. Hermelin, qui conseille alors Jacques Delors, se rapprochera de Dominique Strauss-Kahn et rejoint son cabinet à Bercy en 1988. Passant dans le privé en 1993, celui que l’on définit comme un social-libéral est aussi conseiller municipal à Avignon depuis 2008. Depuis qu’il a intégré l’Afep, un véritable échange d’idées s’est mis en place entre François Hollande et Paul Hermelin, qui se téléphonent régulièrement. Jouant avec Pierre Pringuet le rôle d’intermédiaire entre le gouvernement et les grands patrons, cet homme de réseaux est aussi un proche de Nicolas Dufourcq, actuel directeur général de la Banque publique d’investissement (BPI).
Avec François Pinault, une relation quasi-paternelle
Autre homme d’influence issu du patronat, François Pinault cultive un lien privilégié avec le chef de l’Etat. A tel point que la septième fortune française, propriétaire du Point, du Stade rennais et de Château Latour, n’avait pas hésité à mettre en garde François Hollande au sujet de sa relation avec Julie Gayet, pressentant les remous causés par une révélation inéluctable. D’après le Canard Enchainé, qui a mis en lumière l’amitié qui unit les deux hommes, François Pinault fait preuve d’une réelle franchise lors de ses échanges avec un François Hollande qu’il ne connait que depuis relativement peu de temps. L’ancien président du groupe Pinault-Printemps-Redoute, ancien proche de Jacques Chirac, n’a pas apprécié le mandat de Nicolas Sarkozy et rencontre François Hollande avant les primaires socialistes de 2011. N’attendant plus rien du pouvoir, François Pinault peut parler librement, et parfois vertement, au président qu’il fréquente assidument, et sert ainsi de messager pour exposer les difficultés rencontrées par les dirigeants des grandes entreprises.
Influence ou simple échange de points de vue ?
Pierre Pringuet, Paul Hermelin et François Pinault ne sont en tout cas pas les seuls dirigeants à pouvoir murmurer à l’oreille du président. Guillaume Pepy, le patron de la SNCF, mais aussi Matthieu Pigasse, directeur général de la banque Lazard en France et propriétaire du magazine Les Inrockuptibles, entretiennent une relation privilégiée avec le chef de l’Etat, qui est donc loin d’être isolé dans un milieu pourtant fortement ancré à droite. D’autres patrons, sans être considérés comme étant des proches, partagent des valeurs de gauche, tels que Jacques Maillot, Pierre Bergé ou Jean-Noël Tronc, sans oublier Christophe de Margerie, défunt patron de Total. Si François Hollande peut compter sur ces puissants relais pour soutenir sa politique, reste à savoir si une réciprocité existe, et si les avis donnés par ces grands entrepreneurs sont suivis par le Président, que l’on dit très fortement attaché à son indépendance.
Sources des photos : liberation.fr / la-croix.com