Malala Yousafzai : symbole mondial de la paix à 17 ans
Le vendredi 10 octobre 2014, lorsque la nouvelle est annoncée depuis Oslo, Malala Yousafzai est en cours de chimie à Birmingham. Alors que la jeune fille est studieusement en train d’apprendre les principes fondamentaux de l’électrolyse, le cours est interrompu par la directrice : Malala vient d’être nommé prix Nobel de la paix 2014 (1).
Devant les grilles du lycée, ils sont des dizaines de journalistes, micro en mains, prêts à recevoir ses premières réactions. Mais selon les souhaits de la jeune fille, ils devront attendre 17h que la cloche annonce la fin des cours. Un symbole pour cette jeune Pakistanaise de 17 ans, exilée depuis 2 ans en Angleterre, qui se bat pour l’éducation dans son pays.
L’héritage paternel
Fille d’un père directeur d’école, grand militant pacifique, et d’une mère illettrée, Malala voit le jour le 12 juillet 1997 à Mingora, au nord-ouest du Pakistan. En 2007, alors qu’elle a 9 ans, la région tombe entre les mains des extrémistes. La petite famille est séparée : son père, connu pour ses positions anti-talibans, est contraint de quitter seul la région de Swat. Mais en 2009, il convainc sa fille de témoigner sur son quotidien. Publié sur un blog en ourdou de la BBC sous le pseudonyme de Gul Makai, ‘‘Journal d’une écolière pakistanaise’’ raconte entre autres les incendies d’écoles de filles par les extrémistes, les exécutions des opposants et l’horreur du quotidien. Quelques mois plus tard, lorsque l’armée pakistanaise reprend le contrôle de la région de Swat, l’adolescente est érigée en héros de la nation. Une école est construite en son nom et son visage devient le symbole de la lutte contre l’extrémisme (2).
Le 9 octobre 2012 : sinistre point de départ …
Le 9 octobre 2012, Malala a 14 ans. La journée d’école est finie et l’adolescente sort tout juste d’un examen d’Histoire ‘‘qu’elle est certaine d’avoir réussit’’. Assise à l’avant du bus qui la ramène chez elle par ‘‘le raccourci de la colline’’, elle rêvasse à ses révisions du lendemain lorsque 2 extrémistes s’invitent dans le véhicule. L’un d’eux crie : ‘‘Qui est Malala ?’’ (2)
‘‘ Le bruit que j’entendis alors dans ma tête ne fut celui pas les trois détonations, mais le tchac-tchac-tchac et le ploc-ploc-ploc du boucher qui coupait les têtes des poulets. Puis me revint l’image de petites flaques d’où ruisselaient de minces filets de mon sang écarlate’’ racontera plus tard la jeune fille dans son livre. Elle reçoit une balle à travers le crâne puis est transportée d’urgence à l’hôpital où elle tombe dans le coma. Heureusement, elle est rapidement prise en charge par les forces armées pakistanaises direction Dubaï puis Birmingham pour des soins intensifs. La jeune fille revient miraculeusement à la vie six jours plus tard (3).
… d’une popularité mondiale
Cette tentative d’assassinat, organisée par les talibans dans le but d’effrayer les populations locales, provoque l’effet contraire. Au Pakistan tout d’abord, l’acte est condamné par le président Alif Ali Zardari mais aussi par Nawaz Charif (le leader de l’opposition), ainsi que Irman Khan, un acteur politique pourtant favorable à une trêve avec les forces talibanes. La plupart d’entre eux se présenteront au chevet de l’adolescente durant sa convalescence (4).
Par ailleurs, l’histoire de la jeune fille traverse les frontières et Malala reçoit le soutien de nombreuses personnalités comme Angélina Jolie, Gordon Brown ou Hillary Clinton (5). Au cours des années 2012 et 2013, l’adolescente reçoit successivement de nombreuses distinctions comme le prix national de la paix au Pakistan, le prix Simone de Beauvoir en France ou le prix Sakharov décerné par le parlement européen.
Malala continue le combat
Malgré les cérémonies, Malala ne perd pas de vue son combat. Dès sa sortie de l’hôpital le 3 janvier 2013, et malgré une partie du visage paralysée, la jeune fille court d’une conférence à l’autre clamer son discours. Le jour de son 16ème anniversaire, elle plaide à la tribune de l’ONU : ‘‘ Les extrémistes ont peur des livres et des stylos. Le pouvoir de l’éducation les effraye. Un instituteur peut changer le monde’’. Elle reçoit une standing-ovation de l’audience. Quelques mois plus tard, l’adolescente sort simultanément dans 21 pays un livre autobiographique intitulé ‘‘Moi, Malala, je lutte pour l’éducation et je résiste aux talibans’’.
Cette médiatisation et cette notoriété internationale suscitent quelques polémiques dans son pays d’origine. On dénonce son instrumentalisation par les forces étrangères, et regrette que la jeune fille soit muette sur certains sujets comme les attaques de drones américains, à l’origine des décès de nombreux d’enfants dans certaines zones. Lors d’une invitation à la maison Blanche le 11 octobre 2014, Malala décide d’interpeller le président Barack Obama à ce sujet, faisant ainsi taire les rumeurs qui la qualifiaient ‘‘d’agent américain’’ chez certains musulmans.
Retour à Birmingham le 10 octobre dernier. Malala Yousafzai est finalement sortie de cours en fin de journée et s’est exprimé face aux nombreux journalistes impatiens et entassés dans la bibliothèque. Plus jeune prix Nobel de l’histoire, une journaliste pose la question que l’on pose à tout adolescent : ‘‘Que veux-tu faire plus tard ?’’. La jeune fille, qui rêvait d’être médecin, répond aujourd’hui ‘‘Être une femme politique, changer l’avenir de mon pays et y rendre l’école obligatoire’’. Mais pour l’heure, ce nouveau symbole de la paix doit retourner à ses révisions. Souhaitons-lui de réaliser son projet !
(1) http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/Malala-Yousafzai-17-ans-un-Nobel-pour-les-droits-des-enfants-2014-10-10-1247078
(2) http://omag.arcetlatour.com/malala-yousafzai-lhistoire-incroyable-du-nobel-paix/
(3) http://fr.wikipedia.org/wiki/Malala_Yousafzai
(4) http://www.thenewstribe.com/2012/10/09/malala-yousufzai-in-critical-condition/#.UH1CdIYyQsE
Sources des photos :www.divas-world.com / www.mirror.co.uk /
Discours de Malala Yousafzai (ONU 2013)