Compromis dans l'UE sur la lutte contre l'évasion fiscale
BRUXELLES (Reuters) – L’Union européenne (UE) est parvenue mardi à un compromis en vue de lutter contre l’évasion fiscale des entreprises.
Les affaires Panama Papers et Luxleaks, ainsi que les révélations sur la manière dont des sociétés telles qu’Amazon et Starbucks ont légalement fortement réduit leurs imposition, ont suscité un vent d’indignation.
Après avoir édulcoré une première proposition de crainte que sévir trop rigoureusement ne porte atteinte à la compétitivité de l’Europe, les Vingt-Huit ont accouché d’un compromis sans la moindre portée, de l’avis d’Oxfam, une organisation non gouvernementale de lutte contre la pauvreté, qui estime précisément que l’évasion fiscale ne fait que l’aggraver.
Ce n’est pas l’avis du commissaire européen chargé des questions fiscales. « L’accord d’aujourd’hui frappe un grand coup contre ceux qui tentent de se soustraire à l’impôt sur les sociétés », a dit Pierre Moscovici.
Les Etats ont dorénavant la possibilité d’imposer les bénéfices de sociétés basées dans l’UE qui sont transférés dans des pays à la fiscalité faible si elles n’ont aucune activité sérieuse dans ces derniers. Ils peuvent aussi taxer les actifs développés dans l’UE mais transférés ensuite en dehors de la région, un procédé souvent employé pour éviter de se soumettre à la fiscalité de la propriété intellectuelle.
Le compromis transforme des normes internationales non contraignantes en règles fermes et va au-delà de ce qui a été convenu par l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), ce qui, de l’avis des comptables et auditeurs, est une erreur.
Cet arrangement n’a pu être conclu qu’après avoir renoncé à certaines des clauses les plus controversées du texte d’origine, ou du moins les avoir repoussées, ce qui soulève quelques doutes sur l’efficacité du nouveau corpus.
« Nous ne savons pas précisément ce qu’on pourra récupérer d’impôts », a dit un haut fonctionnaire de la Commission, faisant référence à une estimation du Parlement européen selon laquelle l’évasion fiscale coûte annuellement à l’UE jusqu’à 70 milliards d’euros.
Plusieurs des pays les plus petits de l’UE, dont le régime fiscal est précisément destiné à attirer les multinationales, craignaient un exode de ces dernières si les Vingt-Huit avaient frappé trop fort.
Mais une clause qui prévoyait d’imposer les dividendes et plus-values que les firmes européennes versent aux sociétés qu’elles contrôlent dans des pays à fiscalité faible ou inexistante, un autre moyen d’éviter de payer l’impôt, a été abandonnée.
De surcroît, les Etats pourront bénéficier d’une dérogation à l’application de certaines dispositions du compromis jusqu’en 2024 et non pas 2019 comme cela avait été prévu à l’origine.
(Par Francesco Guarascio Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Marc Joanny)