« Je suis gêné de voir des matchs où l’équipe ne compte pas un seul français », c’est par cette formule que Thierry Braillard, secrétaire d’Etat aux sports, lançait une nouvelle polémique concernant le PSG. Le secrétaire d’Etat répondait à un journaliste des Echos, au cours d’un entretien paru le 2 octobre 2014. Il n’en fallait pas plus pour alimenter le buzz autour du club parisien.
« Moi ça m’ennuie ! »
Le débat autour de l’internationalisation du PSG, ne date pas du 2 octobre. Il a déjà fait la « une » des médias lors du match opposant le PSG à l’Olympique Lyonnais, le 1er décembre 2013. Le détonateur ? Ce soir-là, le PSG gagne sans aligner aucun joueur français dans son onze de départ. C’est une première en France. Le président de l’OL, Jean-Michel Aulas, ne manque pas de le regretter dans un tweet d’après-match : « bravo aux parisiens, écrit-il, un regret, il faut des joueurs français à cette équipe ! » Le chef des sports de RTL, Christian Ollivier, enchaîne aussitôt en se désolant de l’absence de Français : « pour la vitalité de notre football, désolé, moi ça m’ennuie ! », lance-il, lui aussi sur Twitter. Ce à quoi Pierre Ménès, célèbre chroniqueur sportif, réplique en stigmatisant le faible niveau des footballeurs français. Dans le journal l’ « Equipe », on interroge les lecteurs : « êtes-vous choqué par le PSG 100% étranger ? ». Près de 40% de ceux qui répondent se disent choqués. Dans un autre sondage du quotidien sportif, 73% des personnes se montrent favorables à la limitation des joueurs étrangers dans le championnat de France.
Et comme avec le PSG, l’émotion est toujours à vif, le débat déborde bien au-delà de la sphère sportive. Eric Domard, conseiller au sport de Marine Le Pen, se demande si le PSG ne constitue pas « un vecteur d’entrisme de l’émirat islamique (le Qatar) en France ? ». L’hebdomadaire de gauche « le Nouvel observateur » répond par un cinglant : « et alors ? » à ceux qui sont choqués par le PSG 100% étranger. Depuis sa reprise par le fond d’investissement qatari QSI, le PSG est régulièrement rebaptisé par ses détracteurs, QSG pour Qatar SG. Une manière de souligner sa nature « extranationale ».
Finale du championnat de France 100% anglaise !
Alors ? Le PSG traite à la patrie ! En réalité le débat est presque aussi vieux que le football. Ainsi la toute première finale du championnat de France (organisé à l’époque par l’U.S.F.S.A., l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques) oppose en 1894, le Standard Athletic Club aux White Rovers, deux clubs parisiens composés pour l’essentiel de joueurs… anglais ! A l’étranger, en 1908, le Football Club Internazionale est fondé à Milan avec la volonté de permettre à des joueurs non italiens de porter les couleurs de la ville. Le club, connu sous le nom de l’« Inter », se distinguera cent ans plus tard, en 2010, en étant la première équipe à remporter une « Ligue des champions » en alignant un onze titulaire 100% étranger.
Le football n’a, en fait, jamais cessé d’hésiter entre volonté d’ouverture et désir de repli. Pendant plus d’un demi-siècle, les clubs sont soumis à un système de quotas limitant les joueurs étrangers. Il en résulte l’émergence de véritables cultures nationales de football. Le très physique « kick and rush » britannique, le rigoureux « catenaccio » italien ou le flamboyant « football-samba » des brésiliens.
La révolution commence à Dunkerque
Le modèle vole en éclat au début des années 90. La révolution du football arrive par Dunkerque. C’est un refus du FC Liège de laisser partir un de ses joueurs à l’USL Dunkerque qui met le feu aux poudres. Jean-Marc Bosman, le joueur en question, porte plainte en 1993 devant la Cour de justice de l’Union européenne au motif que le système des quotas est contraire à la réglementation du travail de l’UE. La procédure aboutira au fameux « arrêt Bosman » qui interdit aux clubs d’établir des quotas pour les joueurs de l’Union.
Résultat : n’étant plus contraints de se limiter au réservoir national, les clubs alignent des équipes de plus en plus internationales. Le football se mondialise. Ce mouvement se conjugue avec la montée en puissance du sport-spectacle. On le voit notamment en Espagne avec l’apparition, au début des années 2000, des « Galactiques » du Real Madrid. L’internationalisation du PSG ne fait que répercuter cette tendance avec plus d’une décennie de retard.
Football, économie, industrie : même combat !
Mondialisation, protectionnisme, pertes de compétences, de nombreux économistes ou industriels pourraient se retrouver dans le débat qui agite le monde du football. Aujourd’hui les spécialistes craignent les effets négatifs de la mondialisation sur le niveau des équipes nationales. En Angleterre, seuls 32% des joueurs évoluant dans l’élite peuvent jouer en équipe nationale. Pour beaucoup, cette situation explique les médiocres résultats de l’équipe des « trois lions » (l’Angleterre a été éliminée au premier tour de la Coupe du monde 2014).
Au football, comme en économie, il n’existe pas de solutions miracles. En 2008, Sepp Blatter, président de FIFA (Fédération Internationale de Football Association) propose de revenir à une politique de quotas. Le projet est écarté car non conforme au droit européen. Cependant la Russie et la Turquie le reprennent à leur compte. De leurs côtés, l’Angleterre et la France misent sur la formation. Un secteur où le PSG se distingue. Dans un classement réalisé par l’Observatoire du football du CIES en 2014, Paris apparait au 5ème rang européen des clubs formateurs. C’est sans doute la meilleure réponse que les dirigeants du club pouvaient faire afin de montrer que le PSG restait un club français.
Sources des photos : www.deviantart.net / www.pbs.twimg.com / www.footalist.fr / www.sharkfoot.fr