Mère porteuse : législation et dérives à travers le monde Mère porteuse : législation et dérives à travers le monde Mère porteuse : législation et dérives à travers le monde
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Mère porteuse : législation et dérives à travers le monde

Publié le 13 novembre 2014,
par VisionsMag.
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‘‘Louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine, quelle différence ? ’’ La citation est signée Pierre Bergé, milliardaire et célèbre homme d’affaires français. Analyse d’un sujet très délicat et de ses dérives à travers le monde.

En France, comme partout dans le monde, la gestation par autrui fait débat. Les politiques avancent puis reculent sur le sujet, à l’image de Manuel Valls, se positionnant tantôt ‘‘pour’’, tantôt ‘‘contre’’, selon le contexte et l’interlocuteur. Alors candidat aux primaires de son parti pour l’élection présidentielle, il déclarait en avril 2011 au journal ‘‘Têtu’’ y être favorable ‘‘si celle-ci était maitrisée’’. Aujourd’hui, premier ministre, il s’exprime dans les colonnes de ‘‘La Croix’’ : ‘‘La GPA est et restera interdite en France. Il s’agit d’une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes’’. (1)

G.P.A., P.M.A. : quelles différences ?

Certes, les deux sigles se ressemblent mais leurs significations sont très différentes. Tout d’abord, il y a la PMA, autrement dit la procréation médicalement assistée, qui englobe l’ensemble des techniques cliniques et biologiques d’aide à la fécondation : in vitro ou par donneur anonyme. La PMA est légale dans de nombreux pays mais elle est réservée aux couples hétérosexuels infertiles. Elle est aussi parfois utilisée lors d’une grossesse potentiellement dangereuse. Cependant, ils sont 7 pays en Europe à l’autoriser pour les couples de même sexe, à savoir les femmes, délaissant les couples d’hommes pour des raisons évidentes.

La gestation pour autrui (GPA) définit quant à elle le phénomène des ‘‘mères porteuses’’, autrement dit le recours à une tierce personne pour porter l’enfant d’un couple hétérosexuel infertile ou homosexuel.

La GPA dans le monde : Qui dit quoi ?

En Europe, la GPA est interdite dans de nombreux pays comme la France, l’Espagne, la Suède, et des dizaines d’autres. A l’inverse, 3 pays l’autorisent et l’encadrent rigoureusement, à savoir l’Irlande, le Royaume-Uni et la Roumanie. La publicité ou le commerce y sont par exemple interdits. Mais parfois, c’est le flou juridique total. Au Danemark, en Belgique, en Slovaquie et en Pologne, aucun texte de loi n’aborde précisément le sujet, rendant de fait la GPA légale mais non encadrée.

A l’échelle mondiale, c’est le même constat. Une situation surement dut au développement rapide des techniques médicales, prenant de court de nombreux pays comme l’Australie.

La Russie : exemple de flou juridique

La Russie est l’un de ces pays présentant un vide juridique total sur la question de la GPA. En effet, la législation énonce en tout et pour tout que ‘‘toute femme majeure en âge de procréer a le droit de recourir à une fécondation artificielle et l’implantation d’un embryon’’. Elle ajoute qu’un enfant appartient à la femme qui l’a mit au monde. Sans plus de précision, la fonction de mère porteuse est donc légale, ou du moins n’est pas illégale.

Konstantin Svitnev est directeur d’un cabinet spécialisé dans le droit à la famille. Il réclame une législation plus détaillée. ‘‘Voilà 15 ans que des spécialistes se battent pour faire voter une loi qui changerait cet état de fait, car vous imaginez le champ que cela laisse à toutes sortes de chantages et de pressions’ affirmait-il dans une interview. Il raconte ainsi l’histoire de couples divorçant ou disparaissant pendant la grossesse, laissant l’enfant sous la responsabilité de la mère porteuse. Un risque que prennent de nombreuses femmes attirées par l’argent. Elles gagnent 12 500 € par grossesse. Divisé par 9 mois, c’est un salaire 3 fois supérieur au salaire moyen (2).

Mère porteuse : législation et dérives à travers le monde
Parfois confondu avec la PMA, la gestation pour autrui (GPA) est différemment encadrée à travers le monde, faisant de cette pratique un business très lucratif

Les ‘‘fermes à bébés’’ en Asie : une quasi-industrie

En Thaïlande, c’est un autre problème. Si la pratique des mères porteuses est autorisée, les textes de loi restent très lacunaires laissant la porte ouverte à de nombreux groupes mafieux. Certaines cliniques spécialisées présentent même la GPA comme une porte de sortie de la misère pour de nombreuses jeunes femmes. En effet, selon elles, ces dernières profitent durant leurs grossesses d’un confort de vie optimale : rémunération importante, suivi médical précis, alimentation saine afin de garantir la bonne santé du bébé. Mais il ne s’agit bien sûr d’une façade.

Selon un rapport présenté en avril 2012 au Conseil européen, un certain nombre de mères porteuses seraient en fait racolées « telles des prostituées ». Une fois entrées en clinique, elles seraient enfermées et privées de leurs papiers ainsi que de toutes visites familiales. Face à ces scandales, le gouvernement a décidé d’agir, envisageant d’interdire la GPA, quitte à supprimer une importante source de revenus dans les campagnes. Mais difficile de faire passer de telles lois pour cause d’intérêts financiers gigantesques.

A titre indicatif, un bébé coute environ 20 000$ au Thaïlande, contre 150 000$ aux USA, où certains états ont légalisé cette pratique. D’autre part, en Inde, le business du tourisme reproductif s’estimerait à 2 milliards de dollars selon certaines sources.

Cette diversité de positions sur la GPA à l’échelle internationale pose, sur le plan légal, d’importants problèmes à l’échelle nationale. En France, environ 2000 enfants sont nés d’une GPA effectuée à l’étranger. Or, en juin dernier, la Cour européenne des droits de l’Homme a condamné Paris pour son refus d’accorder la nationalité à certains. Enfin, reste la question morale : la GPA est-elle une marchandisation de la vie ?

Source des photos :www.lobbycratie.fr / www.parlonsinfo.fr