Merkel "l'atlantiste" réitère ses doutes sur l'Amérique de Trump
BERLIN (Reuters) – « Atlantiste convaincue », Angela Merkel a de nouveau souligné lundi ses doutes quant à la fiabilité des Etats-Unis de Donald Trump comme pays allié, après les rencontres difficiles qui ont eu lieu ces derniers jours avec le président américain dans le cadre du G7 et de l’Otan.
Dans un discours à Berlin, la chancelière allemande a réitéré les inquiétudes qu’elle avait exprimées la veille lors d’une réunion électorale dans une brasserie de Munich, estimant que le temps où l’Europe pouvait totalement s’appuyer sur les autres était « dans une certaine mesure révolu ».
La semaine dernière à Bruxelles et en Sicile, Donald Trump a critiqué vivement ses partenaires de l’Otan à propos de leurs dépenses militaires et refusé de s’engager, comme ses homologues du G7, en faveur de l’accord de Paris sur la limitation du réchauffement climatique.
Steffen Seibert, le porte-parole de Merkel, s’est attaché lundi matin à présenter la chancelière comme une « atlantiste intimement convaincue » et Angela Merkel elle-même a insisté lundi sur « l’importance primordiale » de la relation transatlantique.
Mais elle a répété ses propos de la veille, malgré les remous qu’ils ont provoqués à Washington.
« Au G7, quand il n’y a pas eu d’accord avec les USA, il est devenu clair que le chemin serait long et difficile », a-t-elle déclaré dans le cadre d’une conférence sur le développement durable. « Je pense qu’il était bon de ne pas passer sous silence nos divergences. »
La chancelière a également lancé une mise en garde à peine voilée à Donald Trump en prévenant qu’il risquait d’isoler les Etats-Unis. « Quiconque met aujourd’hui des oeillères nationales et ne regarde plus le monde autour de lui prend des risques, j’en suis convaincue », a-t-elle dit.
INCERTITUDE
L’Allemagne ne cache d’ailleurs pas sa volonté de travailler avec d’autres pays si la politique de Washington sur le commerce ou le climat se révèle problématique, comme le prouvent les rendez-vous pris cette semaine par Angela Merkel avec les Premiers ministres indien Narendra Modi et chinois Li Keqiang.
Dimanche, Angela Merkel avait également laissé entendre que l’Europe ne pouvait plus totalement compter sur la Grande-Bretagne après le vote en faveur du Brexit.
« Nous, les Européens, devons prendre notre sort en main, bien sûr en toute amitié avec les Etats-Unis d’Amérique, en amitié avec la Grande-Bretagne et en tant que bons voisins chaque fois que c’est possible avec d’autres pays, même avec la Russie (…). Mais nous devons savoir que nous devons lutter pour notre avenir par nous-mêmes, pour notre destin en tant qu’Européens », avait-elle insisté.
« Nous ne quittons pas l’Europe, nous quittons l’Union européenne », a répondu la Première ministre britannique Theresa May lundi lors d’un déplacement électoral à Londres, soulignant qu’elle entendait conserver un partenariat fort avec les pays de l’UE en ce qui concerne le commerce et la sécurité.
Le ministre allemand de l’Intérieur, Thomas de Maizière, a noté pour sa part que la coopération en matière de sécurité avec les services américains était « excellente ». Concernant le Brexit, il a ajouté qu’il ne pensait pas que la coopération avec les services britanniques serait au nombre des questions les plus difficiles des négociations à venir avec Londres.
Jürgen Hardt, le coordinateur du gouvernement allemand pour la politique transatlantique, a noté que l’administration de Donald Trump irritait ses partenaires étrangers.
« Il n’y a jamais eu autant d’incertitude sur la ligne politique et autant de contradictions dans les déclarations présidentielles », a-t-il dit à Reuters.
« Cela affaiblit l’Amérique et irrite ses partenaires. »
(Paul Carrel et Andreas Rinke, avec Costas Pitas à Londres; Danielle Rouquié, Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)